Un grand serviteur de Monteux vient de nous quitter.
On dit que pour être maire, il faut aimer les gens. Raymond CHABRAN a été maire et il aimait les gens ; il les aimait même beaucoup. Son engagement public était l’expression fidèle de sa foi chrétienne et du premier des commandements « aimez-vous les uns les autres », l’union des Montiliens était son credo, unitas fortitudo sa devise.
En 1971, après une participation active à la vie publique et associative, Raymond a été sollicité par Edouard Grangier pour être son 1er adjoint et très vite il s’est retrouvé en situation de faisant fonction de maire car le Sénateur Grangier était souvent à Paris au Sénat.
Au cours de ses mandats, Raymond a eu à vivre des moments très difficiles, je pense par exemple aux deux grandes explosions des établissements Ruggieri, celle de 1973 et surtout celle de 1977 dont il s’apprêtait à célébrer le 40e anniversaire au mois d’avril. Il a vécu très douloureusement ces deux épreuves, et le déchirement des Montiliens qu’elles ont suscité.
Raymond a été élu deux fois sur son nom, en 1977 et en 1983. Je ne vais pas évoquer aujourd’hui ses différentes réalisations car, en accord avec sa famille, nous lui organiserons un hommage public plus tard, aux beaux jours.
Durant son dernier mandat de maire de 1983 à 1989, j’étais son conseiller municipal, mais dans l’opposition. Nous nous sommes opposés sur un certain nombre de sujets, pas sur tous, loin de là, mais toujours dans le respect mutuel. C’était le jeu normal de la démocratie.
Après les élections de 1989, nous avons inversé les rôles, je suis devenu maire et lui, conseiller municipal d’opposition et, au fil des années, une belle amitié est née entre nous et s’est développée tout naturellement.
Aucun esprit de revanche de sa part, toujours intéressé par les affaires municipales bien sûr mais sans jamais d’ingérence et toujours dans le plus grand respect de mes choix. Raymond a fait preuve d’un bel esprit sportif et nous a donné une grande leçon de fair-play.
C’est pourquoi :
- en 1996, j’ai obtenu pour lui le titre de maire honoraire,
- en 1999, je lui ai dédié la Passerelle entre le parc Bellerive et le Parc Notre Dame, hautement symbolique
- et en 2009 j’ai fait voter le nom de Plaine des Sports Raymond Chabran pour notre nouveau complexe sportif de Saint Hilaire.
Beaucoup semblent croire que la vie d’un maire est un long fleuve tranquille, ils aimeraient être à sa place pensant ainsi avoir honneurs et pouvoir. Les pauvres, s’ils savaient, ils y regarderaient à deux fois.
Le maire est toujours en 1ère ligne, c’est lui qui prend les coups, on le tient responsable de tout ce qui ne va pas. Par contre, tout ce qui va bien, ce n’est pas lui, c’est normal.
Raymond a connu tout cela à la Mairie bien sûr, mais aussi à son magasin ; sa boucherie était une annexe de la Mairie, à la fois bureau d’aide sociale, bureau des pleurs et lamentations et confessionnal à l'occasion.
Contrairement à ce que semblaient penser tous ceux qui venaient le solliciter, le maire faisait ce qu’il pouvait sans beaucoup de moyens, il n’avait pas de baguette magique, son quotidien était lourd à porter, et la solitude du pouvoir il la vivait dans sa chair. Tout cela, Raymond l’a vécu et l’a accepté par amour de son prochain, amour de sa ville et volonté de servir. La plupart du temps au détriment de sa vie de famille ; Aline et ses enfants ont eu à en souffrir mais je suis persuadé que la qualité des moments passés ensemble compensait le manque de quantité.
Chers amis, vous avez toutes les raisons d’être fiers de votre mari et de votre père. L’engagement public en responsabilité forge les caractères, rend l’homme plus humain et lui donne profondeur et épaisseur.
Raymond avait un hobby – l’écriture, la poésie – une véritable passion qui lui servait d’exutoire et qui lui permettait aussi d’exprimer sa grande sensibilité, notamment son amour des gens et son amour de sa ville.
Régulièrement il m’envoyait ses poèmes. Le dernier en date, il me l’a donné 4 jours avant de nous quitter. Il était en avance pour la réunion de préparation du 40e anniversaire du dernier drame de Ruggieri. Nous avons papoté une demi-heure. Il m’a expliqué comment il voyait cet événement qui lui tenait très à cœur et il a été très heureux que je lui apprenne que le Foyer Joseph Gontier allait modifier ses statuts pour renouer avec la Municipalité, qu’ainsi la volonté du donateur serait respectée et qu’il pouvait, m’a-t-il dit, mourir l’esprit tranquille.
Oui Raymond je garderai ce souvenir de ce dernier moment passé à bavarder avec toi, tu peux reposer en paix, la volonté de Joseph Gontier sera respectée, le 40e anniversaire du drame de Ruggieri sera célébré comme tu l’as souhaité, je continuerai, comme tu l’as fait toi-même, à veiller attentivement à l’union des Montiliens et au bien-être des habitants de ton cher Monteux.
Ta mémoire sera conservée dans l’histoire de Monteux comme celle d’un homme de cœur.
J’adresse à Aline ton épouse, à Françoise, à Jean-Marie, à tes petits enfants, arrière-petits enfants et à toute ta famille réunie, toute mon affection et à toi, je te souhaite bonne route car je ne doute pas un instant que tu vas aller tout droit au ciel. Voilà ami Raymond, je te dis à la revoyure, mais pas tout de suite, car moi, je vais sans doute devoir faire un détour par le Purgatoire.
1 De Marie-France Farines -
un très bel hommage de Monsieur Gros à Raymond Chabran ! Il a su faire un portrait tres juste , plein de sincérité de celui qu'il ne considérait pas comme un rival mais plutôt comme un ami !!!