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En tant que Président de l’Agence d’Urbanisme Rhône Avignon Vaucluse, mon rôle ce matin est de poser le problème. Je vous propose de structurer mon intervention en deux parties :
Tout d’abord, balayer les grandes caractéristiques de l’espace constitué par la réunion des périmètres de SCOT représentés aujourd’hui de manière à mieux situer cet espace dans son environnement et mieux saisir les liens entre nos différents SCoT
Et ensuite de formuler quelques-unes des questions qu’il faudra que nous nous posions durant cette matinée et, plus largement, à travers une démarche Inter-SCoT, cela afin d’ouvrir des champs de travail et de coopération. Bref, il s'agit de savoir quels sont les sujets communs que doivent aborder les SCoT à cette échelle Inter-SCoT ?
A/ Commençons par donner QUELQUES REPERES POUR COMPRENDRE CET ESPACE
A1/ Pour mieux comprendre l’espace de nos 8 SCoT, regardons-le dans son ENVIRONNEMENT REGIONAL
A1a/ Tout d’abord, quelques chiffres clés sur cet espace, comprenant 8 SCoT :
Nombre d’habitants : plus d’un million d’habitants, Nombre d’emplois : 400.000 emplois, 300 communes.
En comparaison :
L’espace Aix-Marseille-Salon : 1.718.000 habitants, 700.000 emplois, 110 communes.
L’espace Sète-Montpellier-Nîmes : 940.000 habitants, 370.000 emplois, 182 communes.
A1b/ Notre espace partagé est un carrefour, à la charnière, de trois grands systèmes régionaux
Dans son dernier travail de prospective territoriale « Territoires 2040 », la DATAR (Délégation à l’aménagement du territoire et à l’action régionale) nous rappelle qu’il existe trois grands systèmes régionaux dans le sud-est : le languedocien, le provençal et le rhodanien. Nous voyons que notre espace rhodanien méditerranéen se situe précisément à l’intersection de ces trois grands systèmes. C’est un espace charnière. Chacun de ces systèmes a ses logiques en ce qui concerne les liens économiques, culturels, les déplacements.
A2/ CET ESPACE EST STRUCTURE PAR UN RESEAU D’ENTITES GEOGRAPHIQUES QUI S’ENTREMÊLENT
Il s’agit d’un véritable réseau de villes moyennes, toutes situées à proximité les unes des autres et toutes entretenant des liens plus ou moins importants avec les autres, avec chacune son propre bassin de vie quotidien, sa propre zone d’influence.
Nous ne sommes donc pas dans la configuration classique d’un centre urbain et de sa périphérie, mais dans une imbrication de territoires urbains, périurbains et ruraux. Cette diversité, cette complexité est en fait un des grands atouts de cet espace que nous partageons.
On peut voir aussi qu’il est une superposition de plusieurs aires urbaines : des grandes en rouge, et des moyennes en violet.
Je rappelle qu’une aire urbaine est définie à la fois par les communes d’un même continuum urbain et par les communes dont au moins 40 % de leurs actifs vont, chaque jour, travailler dans une autre commune de l’aire urbaine. L’aire urbaine, c’est donc une définition physique des territoires et une réalité économique quotidienne.
Dans l’espace qui nous occupe, il y a l’aire urbaine d’Avignon (qui comprend Orange, Carpentras et Cavaillon), mais aussi celle de Nîmes, celle d’Arles, celle de Bagnols, celle de Beaucaire-Tarascon, et celle d’Apt.
Et nombreuses sont les communes multipolarisées, c'est-à-dire qui font partie de plusieurs aires urbaines.
En bref, nous sommes confrontés à plusieurs entités géographiques qui coexistent, chacune avec ses spécificités et son fonctionnement propre, et en même temps, ces différentes entités interfèrent positivement entre elles.
Voilà les éléments dont nous devons débattre aujourd’hui.
La DATAR nous rappelle que les villes moyennes de notre espace entretiennent de fortes relations entre elles (sur cette carte les grandes métropoles ont été effacées) : les traits sur la carte concernent l’intensité des relations et on voit qu’elles sont nombreuses (déplacements domicile-travail, économiques).
Notre espace connaît ses logiques internes, tout en étant ouvert sur les ensembles urbains voisins et en profitant de leur dynamique. C’est un bel atout que de pouvoir profiter des richesses des autres.
D’où les questions que nous devons nous poser :
Comment tirer pleinement partie de ce positionnement charnière ?
Comment exister à part entière et ne pas être un simple territoire périphérique des entités marseillaise et montpelliéraine ?
Comment ne pas devenir satellite de ces deux grands espaces marseillais et montpelliérain ?
B/ Après ce rapide examen de notre situation, voyons quels pourraient être les sujets susceptibles de nous rassembler.
Sans prétendre être exhaustif, je voudrais pointer pour commencer :
B1/ LES DEPLACEMENTS ET LES INFRASTRUCTURES DE TRANSPORTS.
Notre espace partagé profite d’une situation exceptionnelle sur deux axes européens majeurs de circulation : l’axe rhodanien et l’arc méditerranéen, ce qui en fait, depuis des millénaires, un espace ouvert aux grands flux, les romains ne s’y étaient pas trompés.
Notre espace partagé est exceptionnellement pourvu en infrastructures. Dans un rayon d’une demi-heure, nous trouvons : 2 gares TGV, deux aéroports, un véritable réseau ferroviaire intra et inter urbain, des grands axes autoroutiers, un réseau routier important, des équipements portuaires.
Et nos périmètres de SCoT connaissent de nombreux échanges quotidiens domicile-travail.
D’où les questions :
- Comment mieux assurer la desserte en transports collectifs de nos villes et de nos campagnes ? Comment réussir le pari de la mobilité durable ? Comment mieux connecter nos pôles ?
- Comment mieux profiter de nos infrastructures comme vecteur de développement économique et de notre positionnement territorial à l’échelle nationale ?
B2/ 2e sujet susceptible de nous rassembler : LE TOURISME, LE PATRIMOINE ET LA CULTURE
Notre espace partagé a une histoire qui a laissé des traces avec un patrimoine architectural et culturel fabuleux, ainsi qu’une diversité géographique très riche.
Pour un touriste venu de l’extérieur, il est évident que cet espace a une réelle pertinence : on le voit dans ses pratiques touristiques, ses types de séjours, ses itinéraires. D’autant que cela est fortement en lien avec nos infrastructures de transports.
A l’évidence, ce sujet du tourisme, du patrimoine et de la culture – véritable levier de développement économique – nous relie fortement :
Alors, questions :
- Quel tourisme durable proposer sur ces bases patrimoniale, culturelle et même festive ?
- Comment favoriser nos complémentarités ? Peut-on réfléchir à un label, à des packages touristiques.
- Comment mieux promouvoir notre image culturelle ?
B3/ Autre sujet de développement économique : L’AGRICULTURE.
Outre la richesse agronomique, hydrologique et climatique de notre espace partagé, de réelles filières d’excellence existent. La viticulture, les fruits et légumes sont pour nous de véritables vitrines reconnues.
Ici, l’enjeu est triple :
- Il y a lieu de renforcer ces filières en profitant notamment de notre situation, et entre autres de nos plates-formes logistiques,
- Il y a lieu également de préserver nos espaces agricoles dans nos SCoT,
- Et enfin il convient de veiller sur le long terme à conserver nos approvisionnements locaux au cas où – ce n’est pas une utopie – les coûts des transports deviendraient très élevés.
B4/ 4e sujet : L’APPAREIL COMMERCIAL
L’enjeu ici est de pour favoriser les grands équilibres entre nos territoires, entre les pôles urbains et les pôles ruraux, entre nos centres villes, nos villages et les zones commerciales périphériques.
Quel équilibre trouver entre la grande distribution et les commerces de proximité qui structurent la vie de nos centre-bourgs ?
B5/ 5e sujet : LA FORMATION.
Comment mieux rendre complémentaires nos formations universitaires ? Quelles filières locales mettre en place ? Comment exister face aux deux grands pôles universitaires voisins de Montpellier et d’Aix-Marseille),
B6/ 6e sujet que je veux évoquer : Soyons vraiment forts là où nous sommes déjà forts, VALORISONS ENCORE PLUS NOS FILIERES DE POINTE
Notre espace partagé – cet espace rhodanien méditerranéen – en recèle plusieurs, dont bon nombre sont intégrées dans un pôle de compétitivité.
Je pense notamment à :
- L’Ecotechnologies avec Trimatec,
- Les Fruits et légumes,
- Les risques,
- Le développement des énergies renouvelables dans le bâtiment et l'industrie,
- Les métiers de l’optique et de la photonique,
- Les systèmes agroalimentaires durables,
- L’aéronautique et le spatial avec le pôle PEGASE.
Il y en a d’autres encore, je passe.
Les questions à se poser sont :
- Quels sont nos ressorts économiques ? Comment planifier un aménagement du territoire capable de mieux ancrer les activités existantes et d’en capter de nouvelles ?
- Comment diversifier nos économies ou mieux nous spécialiser ? C’est la question de l’économie résidentielle.
- Comment mieux peser dans la concurrence régionale, nationale et même européenne ?
- Sommes-nous capables, tous ensemble, de mieux promouvoir l’ensemble de nos territoires ?
CONCLUSION
Pour terminer, je dirai que l’Inter-SCot doit d’abord nous inviter à nous questionner à la bonne échelle, tous ensemble, sur nos spécificités, nos atouts, nos faiblesses, sur les vrais sujets communs, mais aussi sur les vrais-faux sujets.
C’est d’ailleurs ce que chacun de nous fait dans son propre périmètre de SCoT.
Les SCoT ont un vrai grand rôle à jouer si nous voulons nous projeter collectivement dans l’avenir, pour choisir et ne pas subir notre développement.
Voilà pourquoi les SCoT et l’Inter-SCoT sont des démarches pionnières.
Si je devais les caractériser en quelques mots, je dirais qu’il s’agit de :
- Co-construire notre avenir en mieux nous appuyant sur nos atouts et en nous enrichissant mutuellement de nos différences.
- Respecter nos spécificités,
- Ne pas nous polluer mutuellement. Ne pas reporter les problèmes des uns chez les autres
- Travailler en confiance et avec enthousiasme
- Enfin être inventif, oui inventif notamment concernant la forme que nous voulons donner à notre démarche Inter-SCoT.
1 De bettylou84 -
Bravo belle analyse !!!
Nous savons que vous travaillerez dans l'intérêt de notre commune, Monteux.
Il nous manque dans notre secteur de Carpentras des étudiant(e)s !!!!
Une antenne de l'université ? Une grande école ? Un grand centre ?...
Et pourquoi sur Monteux ???
Merci.
2 De sannier André -
Après avoir lu et essayer d'assimiler le SCot et maintenant l'inter SCot, il ressort à mes yeux un point essentiel, tous Vous vous penchez sur l'avenir de notre territoire, bien, mais j'y vois un grand absent...Le citoyen habitant et acteur , lui aussi de ce territoire. Ne faudrait-il pas l'impliquer dans ces projets ?
La médiatisation étant pratiquement inexistante sauf aux initiés que vous êtes, Vous les Elus. Juste une réflexion de ma part.